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Les enfants du divorce (partie 2)

Que conseiller, que dire à l'enfant dans ces moments de trouble intense lors d'un divorce et comment protéger l'image de l'amour et du couple.

Écrit par Ghylaine Manet le 29 Aout 2014

Les enfants du divorce (partie 2)

L'annonce de la rupture. Que leur dire ?

L'annonce doit se faire quand les parents l'ont définitivement décidé. Ils le font ensemble, calmement, simplement pour ne pas transmettre leur angoisse et leur ressentiment. Ils prennent leur temps un week-end plutôt qu'une soirée afin de permettre à l'enfant de supporter le choc, de commencer l'assimilation, de laisser aller les émotions, d'être là pour les recevoir. C'est un long processus qui commence à l'écoute de l'enfant, et de ses questionnements.

Heureusement beaucoup de parents sont conscients de leurs responsabilités. Dans le conflit, les adultes révèlent leur personnalité : leur honnêteté, leur générosité, la philosophie de leur vie, la dignité humaine. Si chacun oublie son ego, sa jalousie, son avidité, son orgueil, la situation devient concevable. Mieux vaut se séparer à l'amiable, ce qui ne donne pas à l'enfant une impression de mort, de fin inéluctable, de destruction de la vie, de l'impossibilité d'aimer et d'être aimé. Les divorces qui se passent mal ont été mal annoncés, mal préparés par des parents qui ont eu souvent des comportements pathologiques, voire limites : perpétuelles disputes, dévalorisation de l'un par l'autre, insultes, gestes violents devant les enfants ou à leur insu. Il est impératif de laisser l'enfant en dehors du règlement de comptes. Il est nécessaire d'éviter une situation paradoxale. Ce n'est pas clair, si l'un des parents laisse entrevoir une possibilité de retrouver son partenaire, l'enfant va espérer le retour à la vie antérieure. C'est lui rendre impossible le travail de deuil. À son insu, l'enfant va chercher à être le raccommodeur du couple. Il entre alors dans une pensée magique qui le rendra incapable d'assumer la réalité. Il n'est pas bon de le laisser croire à l'impossible. Cela ne dépend pas de lui. Il ne pourra pas se construire. Il restera dans l'illusion, et dans la souffrance d'être impuissant à réparer l'irréparable. Il se sentira coupable de la rupture, alors qu'il est une victime innocente. Toutes ces pensées empoisonneront quelques années de sa vie. Nous avons des témoignages lors d'analyses de patients adultes.

 

Un exemple d'annonce :

« Ce sont les affaires d'adultes. Ton père et ta mère seront toujours là pour toi. Tu as une vie à construire, toi aussi tu deviendras amoureux, tu comprends ce que c'est que d'aimer, d'être déçu ou de décevoir ton ami. Regarde dans ta classe, au début de l’année, qui avais-tu comme ami ? Six mois plus tard. Que sont devenus tes amis ? Tu vois combien cela change. Et pourquoi t’ont-ils quitté ? Pourquoi tu ne les as plus aimés ? C’est ton histoire. Ton papa et ta maman t’ont donné la vie, ils t’aiment. Ton papa et ta maman ont aussi leur histoire. Cela ne te concerne pas, tu n'es pas coupable. Ils t’aimeront toujours. Tu es en sécurité. N'oublie pas que tes parents seront toujours là pour te soutenir, pour te conseiller, pour t'écouter comme avant. Ils seront là pour tes études et le choix de ta profession, tout au long de ta vie. »

 

En effet, même divorcés, les parents doivent garder leur rôle pour l'éducation de leurs enfants. Le père avec sa parole, sa loi, est essentiel pour sa socialisation. La mère est nourricière et sécurisante. Les deux parents doivent parler d'une même voix, c’est une règle d’or dans toutes les situations, même s’ils sont divorcés. Dans cette situation de rupture, les enfants cherchent toujours les limites et les parents coupables ont du mal à faire face aux scènes de chantage des enfants.

Souvent l'enfant est au milieu d'un psychodrame.

Les adultes se déchirent. L'alcool et le cannabis font partie des soirées où l'on s'étripe sans même se soucier de la présence de l'enfant que l'on juge trop petit pour comprendre alors qu'il ressent profondément la détresse. Quelquefois, au fil des années, il devient l'acteur et imite le comportement excessif de ses parents. Alors il se met en colère, il répond, il insulte, il refuse les règles et il fait payer sa souffrance en développant une situation infernale pour l’ensemble de la famille. Il devient le metteur en scène d’un drame sans précédent. Il apprend la toute-puissance. Et dès sa préadolescence, c'est lui qui fixe d'autres règles : l'argent de poche, les vacances, les sorties, les achats exagérés, pire encore il consomme de l’alcool et fume pour choquer, pour alerter et pour exister. Il jette des phrases culpabilisantes : « vous ne m’avez jamais aimé, je n’ai pas demandé à naître » et c'est souvent la mère qui en est la première victime. Elle en souffre. Une thérapie devient indispensable.

Anna Freud, psychanalyste des enfants, décédée en 1982 à Londres, écrivait à ce propos que la mère était souvent rejetée en dépit de son dévouement. « Aucun être humain n'est totalement aimé. »

 

Pour les femmes, avoir un enfant est la réalisation de leur vœu le plus profond. Elles sont, sur le plan affectif, plus mère et épouse,... Mais, contre toute attente... Quelle que soit la profondeur du dévouement maternel, il ne peut satisfaire les demandes sans limites de l'enfant.

Le plus doux et le plus attentionné et père est altéré dans les fantasmes conscients et inconscients du garçon jusqu'à devenir un monstre et un ogre : figure castratrice terrifiante. Le conseil d’Anna Freud : discerner les éléments de fantasmes de ceux de la réalité.

 

Faits récents : les papas se mobilisent pour réclamer la garde de l'enfant donné très souvent à la mère. Ils n’hésitent pas à défrayer la chronique et à monter sur les grues pour alerter l'opinion (SOS papa 2013, Montpellier et le centre Pompidou, Nantes).

 

Que conseiller dans ces moments de trouble intense ?

Beaucoup d'enfants s'ennuient et perdent le goût de l'effort dans une discipline, et plus encore dans ces moments traumatisants ; choisir dans les sports de combat, les arts martiaux, les sports de compétition (équitation, tennis, golf, natation, escrime, escalade, voile). Ces dérivatifs positifs leur permettront de nettoyer leur mental, de s'investir, d'avoir des règles, de vivre en groupe, de communiquer avec leurs pairs, d'employer leur temps différemment, de se confronter à des apprentissages et de découvrir leurs ressources. Ils auront d'autres repères, ils retrouveront le goût du plaisir et de l'effort. Mettre à profit le temps nécessaire pour que les parents retrouvent une sécurité affective chacun de leur côté et sécurisent l'enfant.

 

Protéger l'image de l'amour et du couple

Ne pas oublier que le couple des parents qui se séparent donne  à l'enfant une image négative du couple et de l'amour. Il est nécessaire de valoriser l'amour pour que l'enfant puisse un jour être heureux avec une personne de son choix. Un divorce n'est pas une fin de vie. Les partenaires doivent continuer à croire au bonheur. La thérapie pour chacun sera nécessaire pour calmer, désensibiliser les situations traumatisantes retrouver la joie de vivre et être capable de nouveau de faire confiance. Chacun des parents peut reconstruire un couple. Aujourd'hui c'est le déchirement pour tous. Mais demain, pour les enfants et pour les parents divorcés, si le travail du deuil s’est bien déroulé, une autre vie peut commencer. Chacun doit se donner le droit au bonheur et à l’amour.

 

dessin enfant divorce

Joie dans la famille recomposée

 

Voir : Les enfants du divorce (partie 1)